La place de la Wallonie avec les bâtiments
du Secrétariat général du Ministère
de la Région wallonne, 2004.

Vue de la Maison communale, 1923.
Carte postale. Coll. privée.

A. Coppens, Monument aux soldats jambois morts pour la Patrie, 1926.
Carte postale. Coll. privée.

L’hôtel de ville de Jambes et les écoles, après 1930.
Carte postale. Coll. privée.

Voilà déjà 12 ans que l’hôtel de ville de Jambes1 a disparu du centre de notre entité, au grand regret de beaucoup de Jambois, et pas uniquement des nostalgiques. On se souvient de cette place sur laquelle trônait l’ancienne Maison communale prolongée à l’arrière par les écoles. Ce n’est pas si loin de nous et pourtant les jeunes ne connaissent que la place de la Wallonie avec la façade en briques et pierres2 derrière laquelle est installé le Secrétariat général de la Région wallonne. Il est donc utile de rappeler l’histoire de cet édifice disparu.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, Jambes connaît un développement économique et industriel important qui amène les autorités à prendre des décisions quant à l’organisation des écoles et à la construction d’un nouvel hôtel de ville. Dès 1873, des pourparlers sont entamés avec la Députation permanente de la Province de Namur. En 1879, Mr l’Échevin Doorne propose au Conseil communal l’acquisition d’un terrain situé Grand’rue. Un autre terrain est en vue rue de Dave, propriété de Mr Guyot, mais la situation n’est pas idéale : circulation importante, voirie étroite, terrain enclavé empêchant des extensions futures, … Les négociations se poursuivent car il y a urgence à créer une place communale. Les Jambois la réclament ! L’on pourrait ainsi organiser des cérémonies, des festivités et y établir un marché public. Le site de la Grand’rue est retenu et des terrains sont expropriés. L’expropriation coûte 31 400 frs à la Commune. Mr Melchior Lambeau recevra 16 400 frs pour sa maison et sa parcelle de jardin et Mr Charles Doorne recevra 14 000 frs pour ses trois maisons et sa parcelle de terrain. La Commune possède ainsi une parcelle de 37 ares 40.
Deux architectes namurois présentent des projets : Adolphe Louis et Alexandre Simon fils. C’est ce dernier qui décroche le marché. Des critiques sont cependant émises. Le perron est jugé trop lourd par rapport aux proportions de l’avant-corps alors que la toiture de celui-ci est « d’une maigreur extrême ». Des problèmes de luminosité, jugée insuffisante, sont soulignés pour la salle communale et la salle du Conseil. L’architecte provincial émet des observations sur la hauteur de la salle de réception du premier étage et estime assez lourd le répertoire des formes architecturales utilisé par A. Simon. Le Ministre responsable ajourne alors le projet de construction. Cette situation ne fait pas l’affaire des autorités communales qui, dès l’achat des terrains, y avaient fait entreposer les matériaux de construction provenant de l’ancienne porte de Jambes et souhaitaient commencer les travaux sans tarder. Nous sommes déjà en 1884 et les locaux communaux deviennent insuffisants et se dégradent fortement. A. Simon fils a revu ses plans et ses devis. Les évaluations s’élèvent à 90 575 frs pour l’école double et à 27 730 frs pour la Maison communale.
En décembre 1886, le projet de construction est enfin autorisé. En juillet de l’année suivante, les adjudications sont terminées. C’est Joseph Procès, entrepreneur à Namur qui est déclaré adjudicataire en présentant l’offre la plus basse, 102 600 frs. N. Nepper, conducteur des Ponts et Chaussées à Namur, est désigné par sa direction comme surveillant des travaux. La Commune désigne Félix Lemercinier comme surveillant des travaux, au traitement de 100 frs par mois. Il sera remplacé, un peu plus tard, pour cause de promotion, par L. Brabant.
En août 1887, les travaux commencent mais directement des problèmes apparaissent. Une polémique surgit sur le choix des ardoises qui doivent couvrir la Maison communale. L’architecte maintient sa position et choisit les ardoises de Fumay au lieu de celles de Warmifontaine. Les travaux avancent et voilà qu’on s’aperçoit que l’on n’a pas résilié le bail de Mr Levaque, locataire d’une des maisons à démolir dans le courant de 1888. Un arrangement sera trouvé et accepté par le Conseil communal. D’autres difficultés viendront émailler la construction de l’hôtel de ville et des écoles mais le Conseil communal insiste auprès de l’architecte pour faire diligence. Un soin particulier est apporté à la façade dotée de pilastres et de colonnes. La pierre de Gobertange sera utilisée pour les balustres du perron et du balcon. Le Conseil décide de séparer par une haie les jardins des enseignants et de clôturer, par un mur de briques surmonté d’un grillage, le côté de la rue d’Enhaive.
En juin 1889, les travaux, à l’exception de quelques finitions, sont terminés. Le Conseil, sur proposition de Mr l’Échevin Mottiaux, décide d’organiser des festivités à l’occasion de l’inauguration de l’hôtel de ville. Les autorités communales prévoient la mise sur pied d’un festival, l’illumination de l’hôtel de ville, l’organisation d’un bal et d’autres animations.
Au cours de l’année 1890, on procède au pavage de la place communale, à l’aménagement de trottoirs et à l’amélioration du début de la rue d’Enhaive. La réception définitive des travaux se déroule en avril 1891. Jambes dispose ainsi d’une remarquable maison communale et d’un établissement d’enseignement pour garçons et filles, au centre commercial de la localité.
En 1892, le Conseil communal décide d’établir dans les dépendances de l’hôtel de ville, un logement pour un concierge et sa famille. Mr Henuit occupera ce poste le premier. D’autres aménagements seront encore effectués comme la construction d’une prison communale avec deux loges dans le sous-sol du bâtiment. Sur la proposition de Mr l’Échevin Lamquet, le téléphone sera installé dans la Maison communale afin de faciliter le fonctionnement administratif.
La place communale connaît une activité de plus en plus intense. Les commerçants adressent une pétition au Conseil communal en vue de la tenue d’un marché sur la place. Une commission étudie la demande et remet un rapport favorable. Le référendum organisé par les commerçants recueille la presque unanimité. Cependant, les commerçants demandent que seuls les produits suivants soient mis en vente : fruits et légumes, volailles, poissons et produits laitiers. Le marché de Jambes est né.
Après la Première Guerre mondiale un Monument aux soldats jambois morts pour la Patrie sera érigé devant l’hôtel de ville et nécessitera une modification de l’escalier. L’architecte Dulière et le sculpteur A. Coppens seront désignés pour la réalisation et l’intégration de ce monument3 en 1925.

Jacques Toussaint,
Président du Centre d’Archéologie, d’Art et
d’Histoire de Jambes

Notes

1. Pour en savoir plus, voir A. Jacques, L’Hôtel de Ville de Jambes, slnd.
2. J. Toussaint, Un symbole, place de la Wallonie, dans Côté Jambes, n°36, 1er trimestre 2002, pp. 8-9. Voir aussi La place de la Wallonie, supplément au n° 224 de Confluent, (Namur projets, n°1), janvier 1995.
3. J. Toussaint, Les sculptures du parc de Jambes, dans Côté Jambes, n° 31, 4e trimestre 2000, pp. 8-9 ; J. Toussaint, Alphonse Coppens, le connaissez-vous ?, dans Côté Jambes, n° 35, 4e trimestre 2001, pp. 8-9 ; J. Toussaint, Portraiture en sculpture et en médaille, dans Portrait en Namurois (sous la direction de J. Toussaint), coll. Monographies du Musée provincial des Arts anciens du Namurois, n°23, Namur, 2002, p. 223.