Page 8 - Côté Jambes 55 - 2006
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ART
                    &

            PATRIMOINE

                                                   Jacques Toussaint



                            Jambes et pieds dans l’eau






        La Meuse impitoyable                       gonfle les rivières qui se déversent dans la Meuse.
                                                   L’eau monte inexorablement car en plus la pluie se
          Si les fleuves sont souvent sources de vie et de   met à tomber. On espère un retour du gel qui ne
        prospérité, moyens de communication et de com-  viendra pas. Le 29 décembre l’eau envahit Jambes
        merce, ils engendrent aussi la ruine, la dévastation,   et Namur.
        la misère.                                   C’est une catastrophe dont on n’a pas eu d’exem-
          Aussi belle et calme qu’elle peut l’être, la Meuse   ples depuis fort longtemps. On assure que ce matin,
        s’est faite vengeresse à trois reprises dans le premier   vers 8h, la situation était la même que celle de 1880,
        quart  du  XX   siècle :  1910,  1920,  1925-1926.  Ce   qui est restée célèbre. Toute la vallée de la Meuse
                  e
        n’était pas les premiers débordements du fleuve, ni   est couverte d’eau.
        des derniers d’ailleurs. L’avocat et historien Galliot   Dans un grand nombre de rues, il y a 1m50 d’eau.
        en avait dressé un inventaire dans son Histoire géné-  Les  services  de  la  distribution  d’eau,  de  gaz,  de
        rale, ecclésiastique et civile de la ville et province de   l’électricité sont interrompus.
        Namur (t. V, Liège, 1790). La liste est longue depuis   Dans les quartiers les plus éprouvés, l’eau atteint
        le XII  siècle : 1175, 1349, 1374, 1460, 1463, 1505,   la  moitié  de  la  hauteur  des  chambres  du  rez-de-
            e
        1560, 1571, 1614, 1641, 1643, 1658, 1663, 1725,   chaussée.
        1740. Que de détresse, que de drames vécus par de   C’est partout la consternation. (Vers l’Avenir, 31
        nombreuses familles namuroises et jamboises.  décembre 1925).
          Voici 81 ans, les 31 décembre 1925 et 1  janvier   La Meuse monte à raison de 30 cm à l’heure et
                                         er
        1926, des inondations considérées comme catas-  on enregistre encore des chutes de pluie considé-
        trophe nationale mettent sous eau plusieurs localités   rables.
        de la vallée mosane. Parmi celles-ci, Jambes est la   Le  jour  de  l’An  1926  est  bien  triste  pour  de
        commune la plus touchée car sur ses 1700 maisons,   nombreux foyers. Les habitants sont cloîtrés chez
        1300 sont inondées.                        eux et manquent d’eau potable, de pain, de gaz et
                                                   d’électricité. Le moral des sinistrés, partout, est resté
        Le Nouvel An 1926                          excellent. On s’entraidait. La courageuse cordialité
                                                   wallonne avait pris le dessus. (Vers l’Avenir, 01-02
          Le début du mois de décembre 1925 est particuliè-  janvier 1926).
        rement neigeux. De fortes averses de neige tombent   Au fort de l’inondation, les spécialistes estiment
        sur la vallée mosane. La neige s’amoncèle et forme   qu’il passe en Meuse dix millions de mètres cubes
        un épais manteau. C’est enfin le dégel généralisé qui   d’eau à l’heure. La Meuse à certains endroits a quintu-

















                      Vues de Jambes prises lors des inondations de décembre 1925-janvier 1926
                                        Cartes postales anciennes.
                                     Namur, Bibliothèque communale.


   8      Côté Jambes - n° 55 - 4 ème  trimestre 2006
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