Page 8 - Côté Jambes 48 - 2005
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ART
                    &

            PATRIMOINE

                                                   Jacques Toussaint



                   La plaquette de Pierre de Soete (1886-1948)

                       commémorant la libération des camps





          Soixante ans après la libération des camps de   sculpteur Pierre de Soete (1886-1948) et les auto-
        concentration de nombreuses manifestations se   rités académiques. Les concepteurs souhaitent
        sont déroulées en Europe et particulièrement en   que soit maintenu le projet initial et cela entraîne
        Pologne. Tout le monde s’accorde à dire « plus   inévitablement polémiques et même procès. P. de
        jamais  ça ».  Pourtant,  on  déplore  chaque  jour   Soete est arrêté par la police de Louvain car il refuse
        encore sur la planète des arrestations arbitraires,   de stopper le déchargement des lettres litigieuses
        des séquestrations, des tortures, en réalité une   à la veille de l’inauguration officielle . Les cinq der-
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        suite ininterrompue d’actes contraires aux droits   nières lettres du mot Restituta restent à Louvain
        de l’homme.                                et sont placées le 2 juillet 2003 dans le Torenhof
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          Jambes (Jambe à l’époque) a connu son lot de   faisant partie de la bibliothèque universitaire . Par
        souffrances. Des Jambois ont été déportés dans   ailleurs, en 1936, les deux premiers mots Feurore
        les camps nazis et certains ne reverront malheu-  teutonico  sont  placés  dans  un  monument  aux
        reusement jamais leur cité mosane.         morts de Dinant. Cependant, en mai 1940, les
          Une  plaquette  en  bronze,  œuvre  de  l’artiste   soldats allemands le font sauter.
        Pierre  de  Soete  (1886-1948),  commémore  la
        libération des camps nazis.

        L’artiste 1
          Pierre de Soete vient au monde à Molenbeek-
        Saint-Jean en 1886. À l’âge de 14 ans, il perd ses
        parents. Il suit les cours de dessin à l’Académie de
        Molenbeek. En autodidacte, il apprend le mode-
        lage. Grâce à sa force de caractère et à son travail
        opiniâtre, il devient ciseleur à la Compagnie des
        Bronzes  à Molenbeek. C’est pour lui l’occasion
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        de faire la connaissance de grands sculpteurs tels
        Julien Dillens, Jef Lambeaux et Constantin Meu-
        nier. À partir de 1914, il se consacre pleinement
        à la sculpture. Les commandes se succèdent :
        monuments, portaits, décors muraux, médailles.
          Après la Première Guerre mondiale, il crée pour
        la façade de la nouvelle bibliothèque de l’Université
        de Louvain une balustrade de 60 m de long et une
        statue de Notre-Dame de la Victoire piétinant l’aigle
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        germanique . Sur la balustrade devait figurer l’ins-
        cription FVRORE TEUTONICO DIRVTA, DONO
        AMERICANO (anéantie par la violence teutone,
        reconstruite par les dons américains). Le recteur
        de l’époque, Paulin Ladeuze (1870-1940), juge ce
        texte trop anti-allemand et donc peu diplomatique
        car le souhait est de renouer contact avec les uni-
        versités allemandes. Cela engendre des conflits
        avec l’architecte Whitney Warren (1864-1943), le   Le sculpteur-médailleur Pierre de Soete


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