Hommage aux Masuis et Cotelis jambois
œuvre en bronze de Raffaele Ligna.

Maquette de la sculpture conçue par Raffaele Ligna

Raffaele Ligna (septembre 2006)

Le Collège échevinal de la Ville de Namur a décidé voilà trois ans de mettre à l’honneur la Frairie des Masuis et Cotelis jambois. Dans cette perspective un concours de sculptures a été organisé et plusieurs projets furent remis par des étudiants de l’Académie des Beaux-Arts de Namur. C’est le projet de R. Ligna, étudiant en 7e année, qui a été retenu.

Les Masuis et les Cotelis

Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, les Masuis et Cotelis sont liés à l’histoire de Jambes. Les premiers dont l’origine remonte au XIIe siècle vivaient à la montagne Sainte-Barbe dans de modestes maisons appelées « masuages ». Ils cultivaient les champs et ristournaient au seigneur (Prince-Evêque de Liège) des redevances annuelles calculées en mesures de blé ou d’épeautre, en chapons ou encore en monnaie sonnante et trébuchante. Plus tard (fin XVIIe siècle), les Masuis travailleront à l’extraction de la houille.
Lors des sièges de Namur, les terres des Masuis seront dévastées et ils ne survivront pas aux soubresauts révolutionnaires.
La plaine de Jambes est morcelée au bas Moyen Âge en parcelles appelées « courtils » exploitées de manière intensive. Le houblon, la vigne et les légumes y sont abondamment cultivés par les « courtiliers » ou « coteliers », appellation française de « cotlis » ou « cotelis » qui exploitent des « cotelages ». La culture maraîchère est leur spécialité mais l’essor démographique de Jambes sera fatal à cette activité, au cours du XXe siècle.
À l’instigation de Félix Rousseau et de Ernest Montellier, Jean Mosseray aidé par Jacques Briac créent au début de 1960 le groupe folklorique Frairie des Masuis et Cotelis jambois, réminiscence des traditions ancestrales.

L’artiste

Raffaele Ligna est né dans le petit village de Gragnano près de Naples en 1955. Installé depuis de nombreuses années en région namuroise, il est père de quatre enfants. Sa sensibilité sociale le conduit tout naturellement à œuvrer dans une ONG en l’occurrence les « Îles de Paix » de la Fondation Dominique Pire. Voilà plus de deux décennies qu’il se consacre à la coopération au développement. C’est très important pour lui car il prend fermement position pour plus de justice sociale.
Parallèlement, R. Ligna s’adonne à la sculpture avec passion. Sa terre natale, l’Italie, compte ô combien de sculpteurs de talent. L’art le met en contact avec une foultitude de personnes de milieux divers. La sculpture est certes un mode d’expression mais c’est aussi un moyen de communication extraordinaire. Grâce à son art, l’artiste trouve le moyen de transmettre des idées. Pour R. Ligna, la démarche employée est aussi importante que l’œuvre elle-même.
L’artiste estime que l’œuvre est porteuse de vie. Elle redonne un sens. Malgré le coût de création et de réalisation dénoncé par certains, la sculpture est essentielle pour l’homme tout comme l’eau et le pain car elle lui permet de vivre dans un environnement de qualité.
À l’Académie des Beaux-Arts (cours du soir) de Namur, dirigée par Jean-Luc Martin, R. Ligna reçoit les conseils de deux professeurs de sculpture : Anneke Lauwaert et Stéphane Gilles. Il aime à le dire car la sculpture qui sera placée au cœur de Jambes porte en elle, en filigrane, un peu l’âme de ces deux sculpteurs.

La sculpture

Regard de lumière, cette sculpture en polyester patiné de Charles Delporte représentant trois têtes de femmes au regard serein tourné vers l’infini (Michel Arnold) a quitté le centre du rond-point Joséphine-Charlotte. L’œuvre de Raffaele Ligna figurant un couple de la Frairie des Masuis et Cotelis prendra place à cet endroit à la fin du mois de septembre 2006.
Ce sont deux danseurs, Nicolas et Élyse que le sculpteur a représenté. Il a opté volontairement pour le figuratif car le vêtement est d’une réelle importance, celui-là même que les fondateurs du groupe folklorique redécouvrirent dans les peintures exposées à l’étage du Musée de Groesbeeck-de Croix à Namur. La sculpture ne rend pas les tons chatoyants de ces costumes mais on imagine bien qu’ils se portaient uniquement le dimanche de la « dicausse ».
R. Ligna veut rendre résolument sa « rusticité » au groupe. C’est le rural endimanché qui est à la fête. On perçoit son bonheur de danser et la jovialité de l’ambiance. Grâce et légèreté se conjuguent avec le côté lourd et rustique du campagnard qui virevolte.
Lorsque Ann Léon terminait son ouvrage sur la frairie jamboise en novembre 1998, édité par la Fondation Francis Laloux, elle émettait le souhait de la réalisation d’une plaque commémorative et d’un couple de danseurs en fer ou en bronze dans le cadre de l’hommage rendu à Monsieur Jean Mosseray. Huit ans plus tard, voilà son rêve réalisé car une sculpture de 2m25 x 2m25 pesant une tonne sera placée au centre du grand rond-point de Jambes. L’œuvre de R. Ligna a été coulée à la fonderie Noël de Jemelle.
Un couple de Masuis et Cotelis jambois danse et imperceptiblement, le sculpteur l’a figé dans le bronze pour l’éternité. Peu importe, il continue à danser…

Jacques Toussaint,
Président du Centre d’Archéologie, d’Art et
d’Histoire de Jambes

Différentes étapes de réalisation de la sculpture coulée à la fonderie Noël de Jemelle