Armoiries du prince-évêque de Liège
Jean de Flandre († 1291)

Détail de la carte manuscrite de la frontière de Flandre par Naudin le Cadet, 1723
Vincennes, Service de l’armée de terre.

La Seigneurie d’Anhaive
Extrait du plan en relief de Namur de
Larcher d’Aubancourt (1747-1749)
Lille, Musée des Beaux-Arts.

La tour d’Anhaive

Les Jambois ne le savent pas encore mais le Conseil Communal de Namur vient de décider en date du 27 avril 2005 d’attribuer un nom au site d’Anhaive. En effet, il s’agissait de donner une adresse au donjon médiéval et au corps de logis seigneurial (1535).
Ces bâtiments classés appartiennent à la Ville de Namur et ont été confiés à la Fondation Roi Baudouin par bail emphytéotique. Le Syndicat d’Initiative de Jambes y aura une antenne touristique et y installera son Centre d’Archéologie, d’Art et d’Histoire de Jambes.
Sur base d’un dossier élaboré par le Centre d’Archéologie, d’Art et d’Histoire et après avoir obtenu l’approbation de la Commission royale de toponymie et de dialectologie, le Conseil Communal s’est prononcé sur l’appellation « Place Jean de Flandre ».
Mais qui est en réalité ce personnage ?
Jean de Flandre est un prélat, fils puîné de Guy de Dampierre, comte de Flandre et comte de Namur, et de Mahaut de Béthune, sa première épouse. Licencié en droit canon de l’Université de Paris, il a été prévôt de l’église Saint-Pierre à Lille avant d’être désigné évêque de Metz en 1279. En 1281, les chanoines du chapitre de Saint-Lambert à Liège n’ayant pu trouver un successeur à Jean d’Enghien, le pape désigne Jean de Flandre comme évêque de Liège. Celui-ci fait son entrée triomphale à Liège le 21 octobre 1282.
C. Douxchamps-Lefèvre précise que son action y a été bénéfique sur le plan diplomatique ; c’est lui qui a été l’artisan de l’accord conclu avec le duc de Brabant concernant la souveraineté sur Maastricht, partagée entre les deux princes, et sur le plan juridique par le frein mis à la puissance de la noblesse liégeoise. Jean de Flandre s’est trouvé dès lors en butte à l’hostilité de l’état noble de la principauté et décide de quitter Liège et de s’établir dans son donjon d’Anhaive pour couler des jours plus paisibles. Il confie la gestion supérieure du pays de Liège à son père, Guy de Dampierre, comte de Flandre et comte de Namur, mais continue à prendre une part active aux affaires liégoises. C’est à Anhaive qu’il reçoit, le 1er juillet 1286, l’hommage de Renaud comte de Gueldre pour la ville de Ruremonde et c’est là aussi qu’il réunit en mars 1290 des membres du Conseil du comte de Namur, des jurés de la ville liégeoise de Dinant et de la ville namuroise de Bouvignes pour régler le différend qui opposait ces derniers au sujet du payement du droit de winage sur la Meuse.
Le chroniqueur Jean d’Outremeuse confirme que Jean de Flandre se rendait à son domaine d’Anhaive par bateau en remontant la Meuse. Il ne bénéficiait pas d’un site escarpé mais les douves aqueuses pouvaient compliquer les assauts malveillants de visiteurs indélicats.
E. Poncelet précise la date du décès de l’évêque à Anhaive, le 14 octobre 1291. Il est certain aussi que le décès eut lieu à Anhaive, dépendance de Jambes lez-Namur : les comptes de Lotin de Bruges (receveur de Guy de Dampierre) en font foi. L’évêque avait, en cet endroit, une maison de plaisance qu’il avait restaurée peu de temps auparavant et il y séjourna fréquemment pendant les dernières années de sa vie.
Jean de Flandre est donc décédé à Anhaive mais a été inhumé à l’abbaye de Flines (nord de la France), que son père avait fondée.
Ce qu’il subsiste de la seigneurie d’Anhaive donne-t-il une idée claire de la demeure de Jean de Flandre ? On imagine mal qu’un prince-évêque se contente d’une petite tour de cinq mètres de côté à l’intérieur et dont les deux premiers niveaux,  seuls d’origine, sont d’un appareillage fort rudimentaire. Les fouilles récentes font état de la complexité des substructions et de la difficulté des interprétations. Le domaine comportait d’autres constructions.

Jacques Toussaint,
Président du Centre d’Archéologie, d’Art et
d’Histoire de Jambes

Pour en savoir plus :

C. Badot, Jambes, autrefois et aujourd’hui, Jambes, 1948, pp. 46-48.
C. Badot, Anhaive et son castel, dans Bulletin de la Société royale le Vieux-Liège, n° 91, janvier-février 1951, pp. 18-20.
C. Chainiaux-Garny, La tour d’Anhaive, Jambes, 1976.
J. de Inclan et T. Modave, Tour et maison seigneuriale d’Anhaive, mémoire non publié, Centre d’études pour la conservation du patrimoine architectural et urbain (Centre Lemaire), Katholieke Universiteit Leuven, 1985-1986, (collab. de Th. Cortembos pour l’architecture).
L. Fr. Genicot, N. Leonard, R. Spede et P. Weber, Donjons médiévaux de Wallonie, coll. Inventaires thématiques du Ministère de la Région wallonne, t. 4, Province de Namur, Namur, 2004, pp. 150-155.
E. Poncelet, Guy de Hainaut, élu de Liège, dans Bulletin de la Commission Royale d’Histoire, 5e série, t. 8, pp. 501-504.
J. Toussaint (sous la direction de), Le site d’Anhaive, coll. Études et documents du Centre d’Archéologie, d’Art et d’Histoire de Jambes, 1, Jambes, 2005 (contributions de D. Allard et J. Geus, C. Douxchamps-Lefèvre, J. Germain, E. Bodart, L. Fr. Genicot, O. Berckmans et S. Plumier, J.-L. Antoine).