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ART & PATRIMOINE  Extrait du « Journal du Siège de la Ville de Namur par les Français », manuscrit Soc. Arch. 65.
             La vue d’un assiégé :
 Le Siège de Namur,    Dimanche 18 septembre
             « A onze heures de la nuit les Français se glissèrent le long des murailles du côté de la Meuse par la brèche
             au-dessous de la tour Saint Roch sans beaucoup de résistance et s’emparèrent des ouvrages de la seconde
 en passant par Jambes *  porte de Saint Nicolas où ils se logèrent. (…) Le général Crommelin avait fait miner la brèche mais on n’eut
             pas le loisir de mettre le feu. Cependant toute cette nuit on travailla à ériger des batteries sur les remparts
             et on barricada la porte de saint Nicolas avec des madriers, poutres, terre et fumier, et on abattit quelques
             arcades du pont de pierre. De même une au pont de Meuse près de la porte de Jambes, où on dit que les
             ennemis s’étaient emparés du chemin couvert et des palissades.
 avec une demi-parallèle qui pinçait l’angle de   Le Capitaine avec 30 hommes qu’on avait laissé au fort Coquelet capitula, il sortit avec les honneurs militaires
 la lunette de la redoute de Bivac.  et fut prisonnier de guerre avec son monde. (…) On abandonna aussi tous les ouvrages et le faubourg de la
 Au cours de la 3  nuit, le boyau de la nuit   porte de Jambes. »
 e
 précédente fut poussé par traverses tournantes   Lundi 19 septembre
 jusqu’au bord de la rivière. On y commença une   « Comme les Français continuèrent à augmenter la brèche du rempart, et qu’ils s’étaient déjà retranchés
 batterie N pour battre l’enveloppe de la porte   entre les deux portes de Saint Nicolas on arbora le drapeau blanc sur le bastion pris de la tour de Saint Roch
 Saint-Nicolas.  à onze heures du matin et on battit la chamade, on demanda à capituler pour la Ville et on convint de donner
 A 10 heures du soir, deux compagnies de   des otages de part et d’autre de la porte de fer à une heure après midi.
 grenadiers d’Alsace munis déchelles surgirent   Tout le quartier de la basse Ville se trouva saccagé par les boulets et bombes. »
 pour escalader la redoute de Bivac. Ces deux
 compagnies étaient soutenues de deux autres de
 grenadiers boyaux, et lorsque 10 ou 12 échelles       nuit, les batteries jamboises ayant ouvert
 furent posées, les grenadiers y montèrent avec        une brèche dans la porte Saint-Nicolas,
 beaucoup d’intrépidité, et prirent ou tuèrent 60      douze compagnies de grenadiers soutenues
 Plan du siège de Namur en 1746 par Borgnet, réunissant les deux plans    hommes qui défendaient la redoute…  de douze autres firent l’attaque de la Ville
 (siège du château et siège de la ville), joints à l'ouvrage de Faesch,   Cette expédition à peine finie, ils aperçurent   de Namur. Elles se glissèrent le long de
 Journaux des sièges de la campagne de 1746 dans les Pays-Bas   sur la rivière une barque remplie de soldats
 (Amsterdam, 1750, un vol. in-12).                     la  Meuse,  montèrent  par  la  brèche  de
 Coll. Fondation Société archéologique de Namur, inv. B-Pl-050.  qui venaient relever ce poste. Ils les laissèrent   l’enveloppe et s’emparèrent de ce vaste
 débarquer dans le plus grand silence et dès           terrain sans essuyer la moindre résistance.
 qu’ils furent entrés dans l’ouvrage, ils les firent   Près de 300 hommes à qui la retraite fut
 prisonniers.                                          coupée se rendirent. A midi du 19 septembre,
 Les Français trouvèrent dans le fort 3 pièces de      le drapeau blanc fut arboré sur la porte
 Nous sommes en septembre 1746. Namur est le   canon et quelques provisions de bouche et firent   Saint-Nicolas, vers minuit, la capitulation fut
 théâtre d’un épisode de la guerre de Succession   123 prisonniers.   signée et deux heures plus tard, les portes
 d’Autriche (1740-1748) : Louis XV veut mettre la   Une batterie P de 8 pièces fut construite, dont   de Saint-Nicolas et de Fer furent remises
 main sur Namur, après avoir successivement   6 pièces visaient le front de saint Nicolas et 2 la   aux Français. Le siège du Château allait
 pris Bruxelles, Malines, Anvers, Mons, Saint-  gorge du fort Balard.  Détail du plan du siège de Namur   pouvoir commencer...
 Guislain et Charleroi.
 Les manœuvres dans la plaine de Jambes furent   Durant la 4e nuit, les français prolongèrent le   en entrant, avait laissé la porte à demi ouverte.
 boyau le long de la rivière pour y placer une
 capitales pour la prise de Namur lors de ce   batterie Q qui commença à tirer dès le matin,   Les grenadiers français s’en aperçurent,   Fiona Lebecque,
 siège. Lisez plutôt, tout en suivant le récit sur   aussi bien que la batterie N.  s’avancèrent et l’emportèrent.  Présidente-Conservatrice
 le détail du plan ci-joint :  Durant la 5e nuit, le crochet, qui terminait le   Durant la 6e nuit, les batteries en brèche   du Centre d'Archéologie,
 L’ordre  d’investir  la  ville  est  donné  le  6   logement gauche destiné à couvrir une batterie   continuèrent avec succès et, au cours de la 7e   d'Art et d'Histoire de Jambes
 septembre. Les dispositions faites et l’artillerie   R dirigée sur la porte Saint-Nicolas, fut prolongé
 arrivée, l’ouverture de la tranchée fut réalisée,   pour installer une batterie S tournée vers le fort
 durant la nuit du 12 au 13 septembre, par 4050   de Jambes. Le feu des assiégés fut fort opiniâtre   * Le présent récit a été rédigé sur base de manuscrits conservés dans la Réserve précieuse de la Société
 travailleurs de nuit, sur les deux rives de la   pendant cette nuit-là.  archéologique de Namur.
 Basse-Meuse et sur les hauteurs du Coquelet.  La redoute Balard, celle qui pouvait le plus   Il s’agit des manuscrits Soc.arch 65 à 71, parmi lesquels le n° 69 reprend notamment des extraits de Faesch,
             Journaux des sièges de la Campagnie de 1746 dans les Pays Bas, Amsterdam, 1750 et de Funck et d’Illens, Plans
 Durant la 2  nuit, les Français poursuivirent   incommoder la tranchée jamboise, fut prise et   et journaux des sièges de la dernière guerre de Flandres rassemblés par deux capitaines étrangers au service de
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 le creusement de leur tranchée sur la plaine   enlevée suite à la négligence d’un soldat qui,   la France, à Strasbourg, chez Melchior Pauschinger, 1750.

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