Jean Delahaut centenaire
Sa recette ? Toujours garder le sourire !
Dans la famille Delahaut, on vit centenaire. Après Mariette Delahaut qui a célébré ses 100 ans en 2022 et qui nous a quittés le 7 octobre dernier, c’est son frère Jean qui a franchi le cap le 24 novembre 2023.
Quelques jours avant cette date, le 20 novembre, les autorités communales célébraient le centenaire entouré de ses enfants et de nombreux convives, avec pour décor la grande salle de la maison de repos voisine. Une réception en toute simplicité agrémentée du discours de Charlotte Deborsu, Échevine et officier d’état civil, dont Jean Delahaut garde un très bon souvenir parce que, dit-il, « le propos était charmant et très positif. Cela m’a ému. Elle a trouvé les bons mots ».
Keeps smiling
Lorsque vous rencontrez Monsieur Jean Delahaut, vous découvrez un homme plein de vie, un brin taquin mais surtout à la mémoire prodgieuse. Son truc à lui pour garder la forme, c’est de toujours rester positif et de « keeps smiling », autrement dit, de garder le sourire. « Quand j’ai un problème, je ne me laisse pas abattre. Je l’affronte, l’analyse et je cherche la solution. Trouver des solutions fait partie du sport, je dirais [rire]. J’aime bien rencontrer une difficulté pour le plaisir de lui trouver une solution, un peu comme au scrabble. Je ne suis pas défaitiste. Je suis un battant. J’ai toujours bien aimé gagner, mais sans égratigner les autres et tout en restant honnête ».
Le secret de sa longévité ? Il n’en a pas vraiment. Mais le médecin retraité spécialisé en ORL et en médecine du sport estime qu’il a eu la chance de toujours pouvoir manger à sa faim et ne jamais connaître la pauvreté. Mes parents ont déjà vécu longtemps pour l’époque. Papa avait 88 ans quand il est parti et maman 94 ans. Et ma sœur à 101 ans. Je ne sais pas si je suis fait pour battre un record [rire]. On se tient bien, on ne commet pas d’excès. Je suis même en meilleure condition que ma sœur au même âge. Je tiens encore la forme en quelque sorte. Comme j’appartenais au corps médical, je me suis toujours soigné à temps ».
Et pourtant, enfant, ce fils de maraîcher avait une santé plutôt fragile. Après 70 ans, il a également subi quelques opérations dont il s’est heureusement toujours bien sorti. Et comme il aime à le préciser, il a toujours été toujours été attentif aux questions médicales. Alors qu’il n’était pas vraiment prédestiné à la médecine, il a pourtant toujours su et dit qu’il serait médecin. « C’était comme une évidence. Je n’ai jamais cherché, ni même pensé à faire autre chose. Mes parents comptaient beaucoup de médecins dans leurs relations, et pour moi il était naturel de le devenir aussi. Je n’ai jamais pensé qu’à ça. J’ai eu la chance de pouvoir suivre des études et de les réussir assez facilement. Quant à la spécialisation en ORL, c’est un peu par opportunisme que je l’ai choisie : il m’a semblé à ce moment-là que ce serait physiquement moins lourd pour ma santé que la médecine générale ».
100 ans, ça représente beaucoup de chose
Quand on lui demande ce que représente pour lui le fait d’être centenaire, Jean Delahaut évoque tout d’abord un sentiment de tristesse ou plutôt de mélancolie car vieillir, c’est perdre en autonomie. « Je ne peux plus aller seul jusqu’à un magasin. Il faut que l’on me ravitaille ou que je sois accompagné de Nicole, mon amie et confidente. Vieillir, c’est être limité dans ses activités, c’est ne plus pouvoir voyager à longue distance. Enfin, c’est bien entendu relatif car j’ai la chance d’être encore vaillant quand nombre de personnes de mon âge sont pratiquement clouées au lit. Pour le reste, je me débrouille seul pour monter dans une voiture et en descendre, aller dormir, manger, … À midi, si je suis à la résidence, je vais manger dans la maison d’â côté pour côtoyer des gens. Je ne joue pas au grand seigneur [rire] ! Je suis libre de faire ce que je veux : je vais chez mes enfants, chez mon amie Nicole. Elle et moi, on se côtoie depuis 1998. Nous nous sommes rencontrés au club Richelieu cinq ans après le décès de mon épouse. Si je veux partir huit jours et rester chez elle, je le peux. Vous voyez, j’ai quand même encore une vie de couple ».
Si c’était à refaire…
Sa vie, Jean Delahaut l’aime ! Et d’ailleurs, si c’était à recommencer, il referait incontestablement le même parcours, mais en travaillant moins. « J’ai réalisé mon rêve d’enfant en devenant médecin et j’ai eu la chance de réussir ma vie professionnelle. Mais j’estime quand même avoir été trop absorbé par la médecine parce que je ne me suis pas beaucoup occupé de mes six garçons. J’ai travaillé pour leur permettre de faire des études, et c’est réussi puisque tous ont obtenu leur diplôme et jouissent d’une belle situation professionnelle à Namur ».
Sa carrière de médecin ORL n’aurait probablement été celle qu’il a vécue sans le soutien indéfectible de son épouse Marie-Paule Mareschal. « J’ai eu la chance de pouvoir compter sur une femme fidèle et aimante, malheureusement décédée en 1993, qui avait le sens du beau et qui, en plus de bien s’occuper des enfants, a dû assumer beaucoup de responsabilités vis-à-vis de leur éducation. Elle leur a prodigué ce que je ne pouvais pas leur donner moi-même, trop accaparé que j’étais par mon boulot ».
Et pour cause ! En plus de son rôle de médecin, Jean Delahaut fut aussi notamment chef de service ORL au CHR de Namur pendant trente ans, président du Conseil médical de la clinique Ste-Elisabeth, président du Conseil médical du CHR de Namur, professeur de chirurgie ORL à l’école d’infirmières Ste-Elisabeth et vice-président de la Fédération wallonne des étudiants de Louvain (Leuven).
Si c’était à refaire, Jean Delahaut le dit, il essayerait d’être plus souvent chez lui. « Je veillerais à accorder plus de temps à ma famille, et un peu plus également aux loisirs et au sport. Quand j’étais jeune, je faisais partie de différentes équipes universitaires en tennis, ping-pong, football, … Et puis, durant 30 ans, je n’ai pas pu m’y consacrer, trop absorbé que j’étais par le travail. À 60 ans, je m’y suis remis et j’ai à nouveau fait partie de diverses équipes ; j’ai participé à des compétitions et à des tournois. Je voyagerais aussi davantage. Quand je vois avec quelle facilité on voyage partout aujourd’hui… Jusqu’il y a 5 ans, Nicole et moi, nous avons pas mal bougé. Nous sommes allés au Canada, aux Etats-Unis, … Maintenant, je ne voyage plus pour des raisons physiques.
Un amoureux inconditionnel des mots
Lire et écrire ont longtemps fait partie de ses passions. En lecture, le genre de prédilection du médecin était le roman policier et le roman à énigmes. « J’ai lu tout Agatha Christie, Stanislas-André Steeman, Georges Simenon, … Le Namurois s’est aussi essayé à l’écriture de pièces de théâtre et de sketches lorsqu’il était membre du club Richelieu dont il fut le président de 1999 à 2001. « J’ai écrit et j’ai même interprété certains rôles. Nous étions quatre amis, quatre amoureux de la langue française ».
Des mots qu’il a aussi mis au service de la poésie en publiant un recueil intitulé « À cœur ouvert » paru aux éditions du Confluent en 2006. Aujourd’hui, cet amoureux des mots n’écrit plus, mais il s’est donné pour objectif d’éditer un deuxième recueil de ses poèmes. L’heure est à la sélection des textes car il lui en reste pas moins de 350. « Je crois que je suis devenu tellement raisonnable que je me suis créé cette obligation de les trier pour me donner une occupation bien concrète, sans quoi les journées paraissent bien longues. C’est un projet que je ne pourrai peut-être pas terminer parce que j’ai atteint un âge où je peux disparaître demain. J’ai dépassé les statistiques courantes [sourire]... Sinon, peut-être sera-t-il fini dans un mois, je ne sais pas ».
Quoi qu’il en soit, Jean Delahaut s’attèle à la tâche. Et de conclure que s’il parvient à ses fins, l’ouvrage ne sera pas à vendre. Il le donnera à ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants et l’offrira bien volontiers à quiconque souhaiterait le posséder.
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