CHAPITRE I : Origine, aspects et rôles du pont de Meuse
2. L’importance du pont de Meuse au Moyen-Age
c. Le pont comme source de revenus

Après avoir abordé les fonctions de limite territoriale et de lieu de justice, voyons comment le pont de Jambes a assumé un troisième rôle pour la commune de Jambes, à savoir celui d’être une source de revenus.

Dans les censiers comtaux, comme dans les comptes du domaine des renseignements circonstanciés sur les tonlieux de Namur (taxes sur les marchandises transportées), nous découvrons que le « winage » se percevait précisément au pont de Meuse. Le winage était en effet une sorte de péage sur le passage des marchands et de leurs marchandises sur la Meuse et constituait un droit perçu au profit du souverain. Au XIVe siècle, il lui rapportait annuellement près de 130 livres et sous sa juridiction, il n’était levé que sur les marchandises prises en gros (tonneaux de vin, mannes de poissons, charretées de sel, de graisses, etc.).

Notons aussi que suivant le fait en usage au Moyen-Age depuis le Xe siècle, des maisons se regroupaient aux deux extrémités du pont, placées en encorbellement et étaient spécifiquement occupées par des marchands. Cette concentration était typique d’une certaine économie médiévale qui était localisée, selon les termes employés dans les textes anciens, « in pontem ». Cette concentration de marchands était toutefois beaucoup moins élevée que celle des « Masuis et Cotelîs » établis sur la rive droite du fleuve.

d. Le pont et son intérêt stratégique

Le quatrième rôle joué par le pont de Jambes durant le Moyen-Age était celui lié son utilité stratégique.

Seul pont sur toute la Meuse moyenne durant le règne de Charles Quint, l’importance stratégique de ce dernier s’est rapidement fait sentir. Effectivement, le pont constituait le seul passage entre le pays et les domaines successivement ajoutés à l’héritage bourguignon du jeune souverain. Dès lors, lorsque l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne se trouvèrent réunies sous le sceptre de Charles Quint, ce fut l’unique endroit de passage pour les troupes de l’Empereur entre ses domaines. Ce fait confirme l’intérêt que ce dernier prêta à son état, en juillet 1516, alors qu’il n’hésita pas à accorder un subside de 2.400 livres à la ville de Namur pour réparer les dégâts causés l’hiver précédent.

Siège de Nameur par le Roy Guiljaum (détail), 1695.
Coll. Fondation Société archéologique de Namur © SAN