Bâtiment médiéval, phase 2
Relevé J. Timmermans, DAO C. Devillers, Infographie A. Bielen © SPW, AWaP
Vue zénithale du bâtiment médiéval dans sa seconde phase d’occupation.

Bâtiment médiéval, phase 1
Relevé J. Timmermans, DAO C. Devillers, Infographie A. Bielen © SPW, AWaP
Vue zénithale du bâtiment médiéval dans sa première phase d’occupation.

Céramiques écrasées sur les remblais
d’incendie de la phase I
© J. Timmermans, AWaP.

Pièce d’échec (cavalier)
Découverte à Jambes, site JAMA, dans les remblais de la seconde phase de construction (début 13e siècle)
Ivoire d’éléphant.
Coll. AWaP.

Une courte opération d’archéologie préventive avait été menée en 2017 au pied de l’Enjambée, côté rue Mazy.
Continuons à remonter le temps à l’aide de leurs découvertes.

Bonne pioche pour les archéologues

Moyen Âge Phase II (en bleu clair sur le plan du chapitre 1 – Côté Jambes n° 115).

Un bâtiment a été découvert dans le secteur fouillé, à 16 m de distance de l’actuel bord de Meuse. La construction est de plan rectangulaire, large de 3,10 m intra-muros pour une longueur d’au moins 6,78m (soit une surface intérieure de plus de 21 m2). Elle bénéficiait d’un sous-sol partiellement excavé.

Trois de ses côtés ont été identifiés dans les limites de la fouille, le bâtiment ayant été recoupé à l’ouest par les fondations de la Villa Balat.

Au bas des murs, des lentilles de mortier signalent qu’il s’agit en fait d’une réfection, que ce bâtiment a été remis en service sur les vestiges d’un édifice plus ancien, incendié.

En effet, un nouveau sol de terre battue a été établi à la surface des remblais d’incendie : composé de limons d’apport hétérogènes, il incorpore un matériel archéologique important, issu de la phase précédente.

Une dépression affecte ce sol, manifestement sous l’effet d’un piétinement intense.

Trois traces allongées et parallèles se répartissent à intervalles réguliers dans l’axe longitudinal de la pièce. L’une d’elles avait conservé une pièce de bois calcinée, posée à plat au fond de la fosse.

Au début du 13e siècle, un incendie semble sceller définitivement le destin du bâtiment. La couleur des parements rougis sur plusieurs centimètres atteste de la violence de l’événement.

Moyen Âge Phase I (en bleu clair sur le plan du chapitre 1 – Côté Jambes n° 115).

Il semblerait que dès sa première phase de construction, vers la fin du 11e ou le début du 12e siècle, le bâtiment bénéficiait déjà d’un sous-sol partiellement excavé, creusé sur plus de 95 cm dans les limons alluvionnaires.

Les parements en pierre qui maintiennent les parois de la structure remontent probablement à cette première phase. Les moellons sont liés au mortier de chaux gris-beige, abondant et de qualité, débordant de joints généreusement beurrés.

Le sol originel n’est perceptible que le long des murs, où il se marque par un fin dépôt d’occupation sombre. Mais le centre du local est surtout entamé, déjà, par une très large dépression, peu profonde, dont les contours sont renforcés de quelques poteaux et de multiples piquets. à en croire les taches de rubéfaction imprimées sur le sol, c’est déjà un incendie qui clôture cette première phase, à une date que le matériel archéologique tend à placer à la transition des 12e et 13e siècles.

Interprétation de ces résultats pour le Moyen Âge

La qualité de la construction de ce bâtiment, aux maçonneries soignées et au mortier généreux, comme la régularité de son plan, contrastent face aux établissements ruraux de la même époque, généralement bâtis en matériaux légers, au départ de poteaux ancrés au sol.

Puisque le matériel archéologique rejeté dans les remblais et dans les niveaux d’incendie montre tous les traits d’un ensemble de consommation, la présence d’un habitat à proximité immédiate ne peut être remise en question.

Il serait même permis d’aller plus loin, en imaginant la présence d’habitat à l’étage du bâtiment et de voir des écuries à l’étage inférieur du bâtiment.

Car rien n’exclut que ce sous-sol en pierre ne représente que la partie excavée d’un bâtiment plus vaste, davantage développé au rez-de-chaussée, voire même pourvu d’un étage. Les pièces de bois carbonisées et les agglomérats de torchis incendiés présents au sein des remblais de démolition témoignent à l’évidence d’élévations en pan-de-bois.

Le bâtiment révélé lors de cette opération d’archéologie préventive ne constituerait donc probablement qu’une part ou une annexe d’un complexe plus important.

Ce complexe pourrait même être assez prestigieux, au vu des objets particuliers qui y ont été découverts : une clef de coffret en alliage de cuivre et une exceptionnel pièce d’échecs en ivoire. La relative rareté d’une telle pièce de jeu, ajoutée à la qualité architecturale du bâtiment, à sa fonction associant habitat et éventuellement des écuries, et à sa situation face au portus du Grognon et au château comtal, suggère peut-être l’établissement d’un membre de l’élite namuroise dans la plaine jamboise vers 1100.